La Provence orientale au 13ème siècle

 Au 13^ème siècle, la Croisade contre les Albigeois ou Cathares décrétée par le Pape Innocent III et dirigée par Simon de Montfort, se terminera par la fin des Cathares sur le bûcher de Monségur et l’annexion du Languedoc par la France.

En Provence, Raimond Béranger V, avec l’aide de son administrateur Romée de Villeneuve, supprime la puissance des Consulats et encourage bourgs et villages pour affaiblir une noblesse peu sûre ; après l’intervention armée du comte, le Consulat de Grasse est supprimé ainsi que celui de Nice.  Une viguerie de Grasse est créée. La viguerie de Nice comprend différentes baillies secondaires; au-delà commence la république de Gênes incluant Menton et Monaco.
Le comte installe ses « baillis »et de nouveaux fonctionnaires : viguier,  juge, clavaire, notaire de cour. Les villes provençales sont à présent entre les mains du comte. Ainsi le comte tient Grasse et y possède les droits de suzeraineté, ainsi que des biens propres. Le comte dispose de palais et forteresses dans différentes villes. A Grasse et dans la région, l’évêque aussi dispose d’un domaine important ; devenue chef-lieu de viguerie, Grasse s’épanouit ; les foires, marchés régionaux pour la vente du bétail ont lieu à Grasse et dans les environs. Grasse commerce essentiellement avec Gênes par la mer..

Le domaine de Lérins est limité mais homogène dans la bande côtière près de Cannes. Le monastère est néanmoins prospère et en pleine expansion, avec de nombreux prieurés. Les possessions du monastère s’étendent alors sur tout le littoral méditerranéen d’ Espagne à l’Italie, et remontent au nord jusqu'au centre de la France,  formant près de 80 prieurés et fiefs.

Les descendants de Rodoard se sont fait grignoter au fil des siècles leurs possessions d’Antibes par les évêques, et celles de Grasse par le Consulat puis le comte de Barcelone; il ne reste donc que deux branches : les Grasse-Cabris et les Grasse-Bar. Biot est une seigneurie de l’ordre du Temple.

L’évêque d’Antibes tient des fiefs dans l’arrière-pays. A Antibes, est instauré un prévôt du chapitre ; l’Université élit des « procureurs », et développe ses privilèges.
 
A l’ouest, les évêques de Fréjus étendent leurs fiefs dans l’arrière-pays : les Villeneuve-Tourrettes; les Villeneuve-Trans; les abbayes du Thoronet et de la Celle, la collégiale de Pignans ; les Hospitaliers de St Jean de Jérusalem ; les Templiers, .. Plus à l’ouest encore, les Blacas, les d’Agout-Pontèves, d’Agout-Trets-Marseille, d’Esparron, de Signes, d’Aubagne, des Baux, …En fait, les mariages et les co-seigneuries fraternelles ont morcelé les droits individuels d'une façon inextricable.

Les guerres difficiles des comtes catalans contre l’aristocratie provençale atteignent aussi le pays deVence au début du 13^ème siècle. La noblesse se retranche dans le haut pays dans certains points fortifiés ; le comte bloque ces positions en construisant 15 nouveaux châteaux ; à la différence des châteaux des siècles précédents, leur rôle militaire et stratégique est maintenant dominant : ainsi à Gréolières-Hautes avec des innovations en matière de défense.
Le pays de Vence est soumis. Le comte le confie à Romée de Villeneuve ; celui-ci construit un « palais ». Des tours de défense sont édifiées pour renforcer les remparts médiévaux encore conservés en partie : tours, portes, portail-levis.
Le pays de Vence est divisé en 27 seigneuries. La cité devient une co-seigneurie entre les évêques et certains seigneurs. Ces derniers entrent dans les conflits avec les magistrats municipaux et l'évêque. A Saint Paul de Vence, la première enceinte de murailles, le haut donjon roman et la tour-porte de Vence datent des 13^ème/14^ème siècles.

A Vence, l’évêché est contigu à la cathédrale ; attenants se trouvent encore l’ancienne maison du Prévôt, la cour de la dîme, les caves et greniers de la « mense capitulaire ». De la cour de la prévôté, des bandes lombardes sont visibles. Alentour, de belles maisons s’élèvent ; quelques témoignages subsistent :  fenêtres jumelées, porte ogivale, tour d'angle avec escalier à vis, maison à encorbellement.

A Grasse, une cathédrale romane est édifiée, d'inspiration lombarde. Ailleurs dans la région l'influence est provençale et cistercienne. Une influence gothique est décelable. La simplicité domine, héritée du premier art roman. Des faces humaines évoquent l’art des Alpes. Dans son prolongement, le palais épiscopal conserve deux arceaux de la fin du 12^ème siècle.

A Grasse, différentes maisons de notables datent probablement de cette époque : maison à angle arrondi avec corbeaux, escalier à vis, une maison à fort bossage, fenêtre romane.



Sur l’île l'abbaye de Lérins était constituée du château fortifié, des l'églises St Honorat et Notre Dame, du cloître, des bâtiments monastiques et des ermitages disséminés. Des adjonctions sont faites au château des moines et le château deviendra le monastère.

 A la fin du 12^ème et au 13^ème siècle, des ordres religieux nouveaux s’implantent : Sisterciens, Franciscains, augustins et dominicains.

 Vers le début du siècle, N. de Grasse serait peut être le père de Bertrand et Targe, premiers seigneurs de la branche des Grasse-Cabris. Les deux frères échangent leurs fiefs.

Au Tignet, « le castrum de Antignaquo » est mentionné au 13^ème siècle; Il s’agit peut-être des ruines situées au-dessus du vallon de St Pierre; en revanche, celles du « Castellaras », paraissent correspondre à un château-garnison avec enceinte polygonale à rôle militaire et stratégique.
 

La présence des Templiers à Grasse est attestée avec construction d’une église et d'un cimetière; la commanderie principale est à Biot.

 
A Vence, la bastide St Laurent deviendra commanderie des Templiers : ceux-ci avaient aussi d’autres places fortes dans la région.

Les Statuts de Fréjus précisent les droits du comte de Provence sur la région. Dans beaucoup de villages, le comte conservait le souverain domaine (« majus dominium »). Ainsi dans certains endroits, il disposait de différents droits qui lui étaient dûs : albergue, cavalcade, « quistes », haute justice ou « mere impere » (justicias majores), … 



Peu après, les statuts entre l’évêque et le chapitre partagent leurs droits sur la région ; le clergé perçoit les dîmes, qui s’ajoutent aux autres taxes seigneuriales ; les évêques reçoivent Antibes et différents fiefs de l’arrière-pays, de même que le chanoine prévôt ,le chanoine sacristain, le chanoine infirmier et les autres chanoines.  Dans certains villages, les chanoines sont seulement « prieurs primitifs » et dans d’autres seigneurs temporels et spirituels. Enfin, Lérins possédait les des prieurés dans l’arrière-pays.

 La sécurité s’établit dans la région et le commerce reprend avec Gênes et Pise. L’enrichissement est général. Antibes est une escale vers le Levant.

Pour diverses raisons, les évêques ont déjà quitté Antibes; le transfert de l’évêché d’Antibes à Grasse est bientôt officiellement consacré.

Louis IX, Saint Louis, fils et successeur de Louis VIII le Lion, met fin pour un temps au conflit franco-anglais et affermit pouvoir royal, ordre et justice. Il participe à deux croisades, en Egypte où il est fait prisonnier et la 8^ème croisade vers Tunis où il meurt de la peste.

 

Charles Ier d’Anjou, frère de Saint Louis est le créateur du royaume angevin ; il épouse la fille de Raymond Béranger et devient comte de Provence. Commence ainsi la 1ère maison d’Anjou en Provence ; Grasse et Nice sont chefs-lieu de viguerie. Vers l’ouest, se trouve la grande baillie de Draguignan, la baillie de Brignoles et St Maximin, la viguerie d’Hyères, la viguerie de Marseille, la baillie d’Aix, etc ..Les états angevins dont partagés entre deux dynasties, la napolitaine et la hongroise qui ont été souvent ennemies.